Il joue un rôle apaisant, sécurisant, affermissant. Il implique inconditionnellement et mutuellement l’affirmation existentielle d’autrui. Qualité de présence Cela a été une révolution pour le gynécologue-obstétricien que je suis, dans la relation de soin, où chacun prend une place d’acteur dans le moment et, en particulier, au cours de la naissance. C’est reconnaitre la place, le rôle de chacun dans la naissance : de la mère et son enfant, du père et des soignants, et ceci à chaque instant. Il ne s’agit pas alors de recette mais de qualité de présence, qui ne nous met pas dans le « faire », dans l’action protocolisée, mais dans l’être ensemble triade mère-enfant-père et équipe soignante.  Cette qualité de présence guide l’accompagnant dans le soutien qu’il peut apporter, sans intervenir à la place des couples, avec une capacité perceptive d’anticipation sur le bien-être de l’enfant et de la mère, sur ce qui s’ouvre comme chemin, ou sur ce qui bloque (ce sont des informations pour préparer des manœuvres, voire des actes techniques : ce qui est étonnant pour un « technicien »). L’haptonomie redonne à chacun une capacité créative. 

Dans notre société, exigeante en actions immédiates en attestations sur papier et formations avec applications tout aussi immédiates, ce temps est un challenge difficile à défendre, à comprendre, mais nécessaire et oh combien gratifiant, quand on accepte et choisit de se mettre sur sa route ! La précision, la prudence, la transparence dans laquelle nous devons travailler, être là, accompagner, est à ce prix ! L’accompagnement périnatal, c’est donc être là aussi dans le monde tel qu’il est aujourd’hui, en gardant le sens originel de la naissance. C’est prendre soin de la mère et de l’enfant dès l’instant où la vie est là et peut-être même avant, pour qu’ils puissent être ensemble dans la con – fiance de ce qu’ils vivent, pour qu’ils puissent le vivre, le vivre mieux, le vivre bien. Le père prend sa place pour confirmer sa femme comme compagne, femme et mère. Le développement neuro-moteur de l’enfant, dans les descriptions embryologiques actuelles, montre que les voies neuronales se forment parce qu’elles sont activées ; Jens SCHOENBERG a montré que les mouvements fœtaux sont importants pour que les voies neuronales se connectent correctement à la moelle épinière. Les mouvements spontanés de l’enfant sont désormais envisagés comme les précurseurs nécessaires au développement cognitif. Dans la génération de la motilité postnatale. (HADDES-ALGRA 2000 ; JOUEN et MOLINA 2007). Dans les premières rencontres avec leur enfant, en tout début de grossesse, il y a de l’étonnement dans l’expérience de la perception, l’expérience du mouvement de l’enfant se déplaçant vers eux. Il y a de l’étonnement, puis un sentiment profond de confirmation de sa place de parent dans la découverte de la capacité de l’enfant, si petit, déjà là, de percevoir le bon plutôt que le mauvais et qui le guide, qui l’appelle au contact, à la rencontre de ses parents, et qui transforme un mouvement réflexe d’un membre en un mouvement de l’enfant vers ses parents. Cette expérience de motilité plus que de motricité est rapidement perçue par les couples et probablement vécue par l’enfant in utero comme expérience dont on s’étonne de constater qu’il cherche à la reproduire. Tout change alentour : le giron maternel devenant plus tendre, les paroles de la mère sont portées différemment ; la présence du père se fait aussi plus tendre, ses paroles dans leur émission et leur transmission à travers le giron aussi. Ces expériences vécues ont toute leur importance pour chacun, et pas seulement dans l’instant. Véritable confirmation réciproque de la place de chacun. Les couples doutent de leur capacité à percevoir si leur enfant va bien ; il faut un avis extérieur pour évaluer les mouvements de l’enfant, sa bonne vitalité… Pour nous, cet accompagnement, c’est prévenir, anticiper, aider face à tout ce qui peut perturber, rendre difficile l’instauration de la relation mère – enfant. Cela commence in utero (et même avant) et se développe après l’accouchement : « quand la confirmation affective de l’accueil dans le giron vient à manquer, le chemin se montre d’emblée difficultueux ». La place de l’accompagnement prénatal, c’est aussi vivre la force que l’Affectif donne à chacun, à la mère en particulier, soutenue par son compagnon. C’est faire vivre des expériences à l’enfant qui vont lui permettre de développer ses propres compétences de mobilité et de motilité. Il va participer au bon vivre de la grossesse, ou à son mieux vivre. Il peut développer une véritable capacité à se faire naitre, pourvu que sa mère lui dise « oui » en le soutenant dans la confiance, affermie par le soutien du père.

Il y a là une vertu thérapeutique instantanée, mais aussi préventive, car on sait combien le vécu de la naissance a une importance pour la mère dans la prévention de la dépression du post partum, mais aussi dans le développement de la relation entre la mère et l’enfant et des troubles de l’attachement. 

En somme, au-delà de tout l’apport affectif et émotionnel de cette pratique elles représentent un formidable outil d’intégration multisensorielle, tactiles, auditives, vestibulaires et proprioceptives à l’enfant. Je vous renvoie au protocole ATVV et H-HOPE de White-Traut. Le protocole ATVV (Auditory, Tactile, Visual and Vestibular stimulation) a été créé par Mme White-Traut et son équipe en 1988. Il a été conçu pour tenter de limiter les effets de l’environnement sensoriel des unités de néonatologie. Ce protocole est très cadré : il est découpé en plusieurs phases distinctes qui ont chacune une durée précise (Burns et al, 1994). Les effets bénéfiques de cet outil sont nombreux et polymorphes.

source : d’après GILLIOT Charles, « La naissance, quel sens. Une équipe dans la naissance aujourd’hui », Présence haptonomique, 2016/1 (N° 12), p. 53-60. DOI : 10.3917/ph.012.0053